Le droit à l’image découle de l’article 9 du Code civil selon lequel « chacun a droit au respect de sa vie privée ».
En ce sens, dans un arrêt du 10 février 1999, la Cour d’appel de Paris associe le droit à l’image à « l’intimité de la vie privée », et considère ainsi que « toute personne a sur son image et sur l’utilisation qui en est faite un droit absolu qui lui permet de s’opposer à sa reproduction et à sa diffusion sans son autorisation expresse et ce, quel que soit le support utilisé ».
Le droit à l’image ne revêt pas un caractère illimité. En ce sens, la Cour de cassation a jugé dans un arrêt du 30 juin 2004 que « toute personne a sur son image un droit exclusif et absolu et peut s’opposer à sa fixation, à sa reproduction ou à son utilisation sans autorisation préalable mais que ce droit doit se combiner avec l’exercice de la liberté de communication des informations, ce dont il résulte qu’une personne ne peut s’opposer à la réalisation et à la divulgation de son image chaque fois que le public a un intérêt légitime à être informé ».
De ce fait, dès lors que le droit à l’information du public entre en jeu, il n’est pas nécessaire d’obtenir l’autorisation d’une personne pour pouvoir réaliser et divulguer des images la concernant.
Dans le cas contraire, toute forme de publication de l’image d’une personne doit impérativement avoir été précédée de l’autorisation écrite de cette personne ou de son représentant légal en définissant les contours de l’utilisation de l’image[i].
Toutefois, la protection du droit à l’image est relativement avancée, notamment en ce qu’elle cible des domaines spécifiques. Ainsi, la jurisprudence a refusé la possibilité de se prévaloir de la liberté de création artistique pour utiliser l’image d’une personne sans son consentement. C’est ce qu’a estimé le Tribunal de grande instance (TGI) de Paris dans une ordonnance de référé du 10 janvier 2013, en expliquant que « le défendeur ne saurait utilement prétendre que la liberté de création artistique abolirait le droit à la vie privée et le droit à l’image des tiers hors l’hypothèse d’une atteinte à la dignité ; qu’outre le fait qu’il n’appartient pas à une juridiction de tracer la frontière entre ce qui peut ressortir ou non à la création artistique, cette solution heurterait, par son caractère absolu, les exigences de l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui imposent aux Etats de protéger ces droits subjectif et d’apprécier concrètement la nécessité de faire prévaloir la liberté d’expression sur les droits à la vie privée et à l’image ».
De plus, il convient de mettre en valeur la prohibition des montages par le Code pénal, dont l’article 226-8 dispose qu’est « puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende le fait de publier, par quelque voie que ce soit, le montage réalisé avec les paroles ou l’image d’une personne sans son consentement, s’il n’apparaît pas à l’évidence qu’il s’agit d’un montage ou s’il n’en est pas expressément fait mention.
Lorsque le délit prévu par l’alinéa précédent est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables ».
Ces dispositions sont particulièrement cohérentes avec les dérives liées à l’utilisation de certains systèmes d’intelligence artificielle que permet de constater l’observation de l’actualité.
L’exemple le plus notoire consiste en l’utilisation qui a été faite d’un logiciel de « deep learning » intitulé FakeApp, qui permet de générer une représentation en 3D d’un visage en se fondant sur des bases de données contenant un minimum d’éléments de photographie de la personne concernée[ii]. Cette application a fait parler d’elle car certains de ses utilisateurs en ont fait un usage quelque peu surprenant, à savoir de remplacer le visage d’actrices de films pornographiques par ceux d’actrices de notoriété internationale telles que Gal Gadot, Emma Watson ou encore Nathalie Portman, de sorte que le résultat obtenu permette de faire croire que les actrices citées précédemment ont tourné dans un film de nature pornographique[iii].
Par conséquent, il apparaît clairement que ce type d’actes relève, du moins en France, de la législation pénale relative au droit à l’image en ce que lesdits actes constituent un montage au sens de l’article 226-8 du Code pénal. Il s’agit ainsi d’être particulièrement vigilant en ce qui concerne les différents usages qui peuvent être faits de l’intelligence artificielle, sans quoi le droit à l’image risquerait de se trouver extrêmement vulnérable.
[i] Fabrice Mattatia, Droit d’auteur et propriété intellectuelle dans le numérique, Paris, Eyrolles, 2017.
[ii] http://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/2018/02/02/32001-20180202ARTFIG00284-avec-l-intelligence-artificielle-l-usurpation-d-identite-en-ligne-prend-une-autre-dimension.php
[iii] https://motherboard.vice.com/en_us/article/gydydm/gal-gadot-fake-ai-porn